, considération sur la nature de l'objet fabriqué : physique, mental ou événementiel) et l'intentionnalité de l'artiste, mais qui élimine la nécessité d'une consignation de l'oeuvre et de l'artiste dans l'institution et dans l'histoire comme condition nécessaire pour qu'il y ait oeuvre 62 , la volonté de mêler art et vie, typique des utopies modernistes s'y retrouvant alors, mais en-dehors de toute ambition d'impact social ou politique. Nous retrouvons une idée développée par Jean-Claude Moineau 63 selon laquelle, si aujourd'hui l'artiste veut être un résistant au monde, son art doit se cacher, et se faisant, doit résister à l'appellation « art" 64 . On peut, à la suite de Richard Shusterman, se demander dans quelle mesure il est fait retour ici au mythe de la pratique d'un art à l'abri de tout intéressement, hormis peut-être cette « fonctionnalité globale" dont parle Dewey et qui désigne l'idée que la valeur de l'oeuvre réside dans le fait qu'elle enrichit la vie de l'être humain. On peut se demander si le concept romantique de « l'art pour art", faisant de l'art lui-même une utopie, ne réapparaît pas ici -mais, comme nous l'avons dit plus haut, en dehors de toute légitimation communicationnelle. A cette question, nous répondrons qu'effectivement l'utopie de l'art se retrouve ici, mais son sens a changé avec la transformation du concept d'art : elle ne concerne plus les oeuvres elles-mêmes en tant que véhicules d'une vérité

, Mais on peut aussi considérer que cette construction par l'art d'un univers individuel et solitaire n'a dans le fond plus rien à voir avec l'utopie, laquelle ne peut pas se passer de la question de l'altérité, laquelle concerne nécessairement l'autre : « une utopie implique nécessairement biais de techniques démocratiques telles que la toile

, Esthétique et poétique. Textes réunions et présentés par Gérard Genette, pp.9-32

, Dégagé de cette « théorie institutionnelle », cette conception de l'art ne renoue pas pour autant avec l'essentialisme selon lequel l'art est un concept ontologiquement définissable

M. Jean-claude and «. , Art sans art », Omnibus, Journal d'art trimestriel n°14, pp.8-11, 1995.

, Cela se comprend aisément si l'on saisit que l'utopie est intrinsèquement induite par la nécessité de défaire l'institution, que l'on entende ce mot en rapport à l'idéologie instituée ou en rapport aux institutions de la société

J. Albert, Petite philosophie à l'usage des non-philosophes, p.215

, Par ailleurs, notons que l'essor de ce type de pratique artistique est soutenu par le développement des techniques démocratiques de reproduction et de diffusion (livres, CD-Rom, réseau, etc) dans la mesure où ces supports offrent la possibilité d'échapper à l

M. Foucault, Edition publiée sous la direction de Daniel Defert et François Ewald avec la collaboration de Jacques Lagrange, édition Gallimard, collection Bibliothèque des sciences humaines, vol.4, 1980.

, Voir aussi « Des espaces autres, Architecture, pp.46-49, 1984.

, Le site indique que Michel Foucault n'autorisa la publication de ce texte

J. and ». Transit, 69 A ce sujet, voir : Nicolas BOURRIAUD, L'Esthétique relationnelle, Les Presses du réel, p.39, 1998.