L’impact de la PreParE sur l’activité, les revenus et les modes de garde - Equipe de Recherche sur l'Utilisation des Données Individuelles Temporelles en Economie Accéder directement au contenu
Rapport (Rapport De Recherche) Année : 2023

L’impact de la PreParE sur l’activité, les revenus et les modes de garde

Résumé

La dernière réforme française du congé parental, entrée en vigueur le 1er janvier 2015, a instauré la Prestation Partagée d’Education de l’enfant (PreParE). Elle avait pour objectifs affichés, d’une part, de « favoriser le retour des femmes vers l’emploi » et, d’autre part, de « modifier la répartition des responsabilités parentales au sein du couple pour qu’elle ne joue plus systématiquement en défaveur des femmes ». Pour les parents ayant donné naissance à un deuxième enfant ou plus, cette réforme s’est traduite par une réduction de 36 à 24 mois de la durée maximale d’indemnisation du congé parental si les deux parents ne partagent pas le congé. Elle a ainsi supprimé de facto la possibilité qu'un seul parent bénéficie d’un congé parental indemnisé jusqu'au troisième anniversaire de l'enfant. Elle a créé une situation inédite pour les mères françaises pour au moins deux raisons. Premièrement, celles-ci sont confrontées à un congé parental indemnisé pris individuellement d’une durée raccourcie d’une année. Deuxièmement, elles ont désormais la possibilité de rester en congé parental pendant la troisième année mais sans percevoir d’indemnisation. L’objectif de ce rapport est tout d’abord d’évaluer l’effet de l’entrée en vigueur de la PreParE sur le taux de recours à cette prestation au cours de la troisième année après la naissance d’un deuxième enfant ou plus. Nous étudions ensuite les effets de la réduction d’un an de la durée d’indemnisation du congé parental engendrée par la réforme sur la situation d’emploi des mères, non seulement à court terme (entre le 2e et le 3e anniversaire de l’enfant), mais également à moyen terme (entre le 3e et le 6e anniversaire). Enfin, les conséquences de cette réduction sur le taux de recours des familles à certains modes de garde formels au cours de la troisième année après la naissance sont analysées. Pour identifier l’effet causal de la réforme sur ces trois dimensions, la stratégie d’identification adoptée se fonde sur le principe de régression sur discontinuité. Elle consiste à comparer la situation des familles ayant donné naissance à un deuxième enfant ou plus en janvier 2015 avec celle des familles ayant donné naissance en décembre 2014. Considérer des familles très proches dans le temps garantit, sous certaines conditions, que leur seule différence réside dans le fait que certaines sont concernées par l’entrée en vigueur de la PreParE et les autres non. Nous mobilisons les fichiers administratifs produits par la CNAF qui permettent de couvrir de manière quasi-exhaustive l’ensemble des familles ayant au moins deux enfants à charge et donc potentiellement concernées par la réduction d’un an de la durée d’indemnisation du congé parental. Notre analyse porte sur les familles en couple ayant au moins un enfant à charge au moment de l’arrivée du nouvel enfant et n’ayant pas eu de nouvelle naissance au cours de la période potentiellement concernée par le congé parental. L’entrée en vigueur de la PreParE s’est logiquement traduite par une chute très importante dans la prise du congé parental indemnisé à taux plein comme à taux partiel, pour les mères au cours de la troisième année suivant la naissance. Certaines catégories de mères ont été plus particulièrement impactées par la réforme. Il s’agit notamment des mères ayant les contraintes familiales les plus fortes et appartenant aux ménages les moins aisés. En revanche, la réforme n’a pas réellement encouragé les pères à recourir au congé parental. Seule une très légère hausse de leur taux de recours au congé parental indemnisé à taux partiel est observée lors de la troisième année (+1,1 pp). Cette hausse infime n’a donc pas pu engendrer une modification significative de la répartition des responsabilités parentales au sein des couples, telle que souhaitée dans les motifs de la réforme. En revanche, la réforme a en partie atteint son premier objectif puisque la réduction d’un an de la durée d’indemnisation du congé parental a augmenté la probabilité des mères d’être en emploi, non seulement lors de la 3ème année de leur enfant (+20 pp.), mais également sur les trois années suivantes (+3,4 pp.). En d’autres termes, certaines mères, qui n’auraient pas repris d’emploi après trois ans de congé parental indemnisé, en reprennent un quand ce congé ne dure que deux ans. Ces mères sont à la fois celles qui avaient la probabilité la plus élevée de quitter le marché du travail suite à une interruption de carrière de trois ans et celles pour lesquelles la réforme a eu le plus d’impact sur leur probabilité de retourner en emploi à court terme. Il s’agit à nouveau des mères ayant les contraintes familiales les plus fortes et appartenant aux ménages les moins aisés. Ces résultats différenciés selon le niveau de revenu font écho à la dimension de « segmentation sociale » du congé parental français liée à son indemnisation faible et forfaitaire. Enfin, le retour plus précoce en emploi des mères ayant pris un congé parental suite à l’entrée en vigueur de la PreParE a contribué à augmenter le taux de recours à certains modes de garde formels (assistante maternelle, garde à domicile, micro-crèches) au cours de la 3ème année suivant la naissance. Néanmoins, l’effet positif de la réforme sur ce taux de recours est presque deux fois moins important que celui observé sur l’emploi des mères à court terme. Compte tenu du fait qu’il est relativement difficile d’obtenir une place en crèche pour un enfant de deux ans, un nombre non négligeable de mères ont certainement eu recours à des modes de garde informels (parents eux-mêmes, familles, amis, voisins) au cours de la 3ème année après la naissance. Il semble donc indispensable de proposer une offre adéquate de places en structures d’accueil et auprès d’assistantes maternelles, notamment pour les enfants âgés de deux ans.
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Origine : Fichiers éditeurs autorisés sur une archive ouverte

Dates et versions

hal-04426961 , version 1 (20-02-2024)

Identifiants

  • HAL Id : hal-04426961 , version 1

Citer

Mathilde Guergoat-Larivière, Mathieu Narcy, Florent Sari. L’impact de la PreParE sur l’activité, les revenus et les modes de garde. Centre d'études de l'emploi et du travail - CEET; France Stratégie; Haut conseil de la famille, de l'enfance et de l'âge. 2023. ⟨hal-04426961⟩
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